« Comme il n’y a pas, ainsi que nous l’avons montré bien des fois, d’usage transcendantal des concepts purs de l’entendement non plus que ceux de la raison, et comme la totalité absolue des séries des conditions dans le monde sensible se fonde uniquement sur un usage transcendantal de la raison qui exige cette totalité inconditionnée de ce qu’elle suppose comme chose en soi, et comme, d’un autre côté, le monde sensible ne renferme rien de semblable, il ne peut alors jamais plus être question de la grandeur absolue des séries dans ce monde, ni de savoir si elles peuvent être en soi limitées ou illimitées, mais seulement jusqu’où nous devons remonter dans la régression empirique qui ramène l’expérience à ses conditions, afin de ne nous arrêter, suivant la règle de la raison, à aucune autre solution de ces questions qu’à celle qui est conforme à l’objet.
Il ne nous reste ainsi d’autre valeur du principe de la raison que celle d’une règle relative à la progression et à la grandeur d’une expérience possible, puisque nous avons suffisamment prouvé qu’il n’a pas de valeur, à titre de principe constitutif des phénomènes en eux-mêmes. Aussi, si nous pouvions mettre cette valeur clairement hors de doute, le conflit de la raison avec elle-même serait pleinement terminé, puisque, par cette solution critique, non seulement l’apparence qui la divisait avec elle-même serait dissipée, mais qu’à sa place le sens où elle s’accorde avec elle-même et dont l’équivoque seule occasionnait le conflit aura été établi et que le principe jusque-là dialectique sera converti en un principe doctrinal. En fait, si l’on peut justifier le sens subjectif de ce principe qui consisterait à déterminer l’usage de l’entendement le plus grand possible dans l’expérience, conformément aux objets de cette expérience, c’est précisément comme si, en tant qu’axiome (ce qui est impossible par la raison), il déterminait a priori les objets en eux-mêmes ; car un axiome même ne pourrait pas, relativement aux objets (Objecte) de l’expérience, exercer une plus grande influence sur l’extension et la rectification de notre connaissance que celle d’appliquer son activité dans l’usage empirique le plus étendu de notre entendement. »
(In : Emmanuel KANT. « Critique de la raison pure ». Éditions Quadrige/Presses Universitaires de France, Paris, 4° édition, avril 1993, pages : 385 – 386).
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