Analyse d’affirmations d’Elisabeth Roudinesco
dans son interview parue sous le titre
« La révolution freudienne »
dans Le Monde des Religions, juillet-août 2009, n° 36, p. 44-45
(Le texte complet de l’interview se trouve à la suite de l’analyse)
par Jacques Van Rillaer
Professeur de psychologie à l’université de Louvain
et à l’université St-Louis (Bruxelles)
Freud change le regard sur la sexualité. Aussi sera-t-il accusé, par toutes les religions, particulièrement le catholicisme, d'être un profanateur de la famille, un dynamiteur de la société, un démon darwinien et un obsédé sexuel. Pourquoi ? Parce qu'il considère que la société bourgeoise bride le désir sexuel. Au lieu de pointer du doigt l'anormalité, il va montrer que tous les conflits à l'origine de l'être humain sont au départ sexuels et liés au désir. Si les femmes de cette époque sont hystériques, c'est parce qu'elles ont des frustrations, non parce qu'elles sont anormales. » (p. 44)
V.R.
a) En matière de sexualité, la théorie freudienne ne constitue pas une révolution. Il suffit de lire convenablement Freud lui-même pour s’en apercevoir.
Dès ses premiers textes, Freud écrit que l’incidence de la sexualité dans certains troubles a été clairement affirmée avant lui. Ainsi il écrit
en 1896 : « Ce n'est pas, à vrai dire, une proposition nouvelle, inouïe. On a toujours admis les désordres sexuels parmi les causes de la nervosité.[1] » Freud déplore seulement que l’« on a restreint l'influence étiologique des désordres sexuels à un nombre limité des cas observés » alors que lui-même explique alors TOUS les troubles mentaux, sans exception, par la sexualité.
en 1898 : « Par des investigations approfondies je suis parvenu, dans les dernières années, à cette connaissance que des facteurs issus de la vie sexuelle constituent les causes les plus proches et pratiquement les plus significatives de chacun des cas d'affection névrotique. Cette doctrine n'est pas entièrement neuve ; une certaine significativité a été concédée au facteur sexuel dans l'étiologie des névroses, de tout temps et par tous les auteurs ; pour de nombreux courants souterrains de la médecine, la guérison des “maux sexuels” et celle de la “faiblesse nerveuse” ont été toujours unies dans une seule promesse. » [2] »
L’importance de la sexualité dans la vie des êtres humains, des enfants et des personnes perturbées avait été clairement affirmée par plusieurs auteurs avant Freud. Même des freudiens reconnaissent ce fait. Citons à titre d’exemple : F. Laplassotte (1977) Sexualité et névrose avant Freud : une mise au point. Psychanalyse à l'Université, 3 : 203-226.
Pour un exposé détaillé de la question par un historien compétent et non partisan, voir Frank Sulloway (1979) Freud, biologist of the mind : Beyond the psychoanalytic legend. N. Y.: Basic Books. Trad.: Freud, biologiste de l'esprit. Fayard, 1981, 595 p. Rééd. 1998, 620 p.
b) Les freudiens affirment souvent que Freud a supprimé la frontière entre la normalité et l’anormalité.
Certes, Freud reprend à son compte la formule de Paul Moebius « nous sommes tous un peu hystériques »[3] et ajoute que « la disposition à la perversion est partie intégrante de la constitution normale »[4]. Toutefois, il parle toujours des personnes qui le consultent comme de « malades » (Kranken) ou de « névrosés » (Neurotikern). Il déclare que TOUTES les activités sexuelles sans coït sont « PERVERSES » (perverser Sexualübungen) et qu’elles sont à proscrire pour trois raisons : « Elles sont condamnables sur le plan éthique car elles rabaissent cette chose sérieuse que sont les relations amoureuses entre deux être humains à un jeu agréable sans danger et sans participation de l'âme » ; elles favorisent l'homosexualité ; elles handicapent la sexualité dans le mariage : les hommes seront moins puissants, les femmes seront frigides et, finalement, maris et femmes renonceront aux rapports sexuels.
Freud met en garde surtout contre la masturbation qui, selon lui, corrompt le caractère, prédispose aux névroses et même aux psychoses (!). C’est la voie de la facilité, écrit-il. Elle engendre des fantasmes qui font désirer ce qu'on ne trouve pas dans la réalité [5].
c) Mme Roudinesco écrit : « Si les femmes de cette époque sont hystériques, c'est parce qu'elles ont des frustrations, non parce qu'elles sont anormales. »
C’est l’opinion de Mme Roudinesco, mais pas celle de Freud. Jusqu’en 1897, le neurologue viennois affirme que la frustration sexuelle produit, aussi bien chez les hommes que chez les femmes, la « névrose d’angoisse ».
L’hystérie, il l’explique alors toujours comme la conséquence du refoulement d’une séduction sexuelle [6]. A partir de la fin de 1897, il abandonnera la théorie de la séduction au profit de la théorie du fantasme : il expliquera tous les cas d’hystérie, non par des « frustrations sexuelles », mais par le refoulement de fantasmes de séduction ayant accompagné des activités auto-érotiques.
2. « Jusqu'en 1897, date à laquelle il élabore sa première théorie sexuelle, il voit beaucoup de femmes qui disent avoir subi des abus.
La névrose adulte, pense-t-il d'abord, vient de traumatismes sexuels réels, et puis il s'aperçoit que si certaines femmes ont véritablement connu un abus, d'autres l'ont sincèrement imaginé : il invente ainsi la notion de fantasme. » (p.44)
V.R. :
Il est étonnant que Mme Roudinesco répète, encore de nos jours, la légende des récits spontanés de séductions infantiles imaginées. En effet, depuis que Frank Cioffi (professeur à l'université de Kent à Canterbury) a dénoncé ce mensonge freudien en 1974 [7], de nombreux historiens de la psychanalyse ont montré la contradiction évidente entre les textes freudiens des années 1890 et ce que Freud a raconté bien des années plus tard[8]. Qu’il nous suffise ici de citer deux textes qui montrent clairement que les femmes n’ont pas « sincèrement imaginés » des abus sexuels. C’est Freud qui les conditionnait à imaginer ces récits, un fait qu’il n’a jamais voulu reconnaître !
« Les malades ne racontent jamais ces histoires spontanément, ni ne vont jamais dans le cours d'un traitement offrir au médecin tout d'un coup le souvenir complet d'une telle scène. On ne réussit à réveiller la trace psychique de l'événement sexuel précoce que sous la pression la plus énergique du procédé analyseur et contre une résistance énorme, aussi faut-il leur arracher le souvenir morceau par morceau.[9] »
Freud précise ailleurs que, « dans la plupart des cas, les souvenirs n'étaient retrouvés qu'après plus de cent heures de travail.[10] »
Bien plus tard, Freud donnera une version radicalement différente des faits. Il écrira par exemple :
« À l'époque où l’intérêt principal était dirigé sur la découverte des traumatismes sexuels de l'enfance, presque toutes mes patientes me racontaient qu’elles avaient été séduites par leur père. Il me fallut finalement constater que ces rapports n’étaient pas vrais, et j'appris ainsi à comprendre que les symptômes hystériques dérivent de fantasmes et non pas d’événements réels. Ce n’est que plus tard que je pus reconnaître dans ce fantasme de séduction par le père l'expression du complexe d'Œdipe typique chez la femme.[11] »
E. Roudinesco précise que Freud « invente la notion de fantasme ».
Affirmation étonnante pour une historienne de la psychanalyse. Il suffit de lire convenablement Freud pour s’apercevoir qu’il reprend cette notion à Moriz Benedikt. Il écrit en 1899 : « Les psychiatres n’ont pas encore suffisamment étudié le rôle du fantasme dans la vie psychique. On peut attendre beaucoup à cet égard des recherches de M. Benedikt[12]. »
3. « Il [Freud] fera ainsi scandale en 1905, en affirmant qu’il est parfaitement normal pour un enfant de se masturber et que tous les enfants ont une sexualité pulsionnelle. Cela devient “anormal”, lorsque ça tourne à la manie fétichiste. » (p. 45)
V.R. :
Mme Roudinesco ressert ici un des grands mythes freudiens. Elle ferait bien de relire l’ouvrage de Henri Ellenberger qu’elle a fait rééditer en 1994. Le célèbre historien de la psychiatrie écrit qu’en rassemblant les comptes rendus publiés tout de suite après la parution des Trois Essais, deux psychanalystes américains, Bry et Rifkin ont mis en évidence un bel exemple de la légende des « résistances »[13].En effet, la plupart des recensions étaient positives, fait qui s'explique très simplement : les idées présentées dans les Trois Essais de 1905 étaient fort peu révolutionnaires pour la Vienne de l'époque.
Ellenberger a examiné de près la littérature sexologique de la fin du XIXe siècle. Je renvoie à son exposé (pp. 249-257 ; 425-432), me contentant ici de quelques-unes de ses conclusions :
« Lors de la parution des Trois Essais en 1905, on s'intéressait énormément aux problèmes sexuels et il est difficile de faire la part entre les sources de Freud et les développements parallèles. (...) Depuis 1886 (date de la parution de la Psychopathia Sexualis de Krafft-Ebing), les publications sur ce sujet n'avaient cessé de se multiplier et il devenait de plus en plus difficile d'en faire le tour. En 1899, Magnus Hirschfeld avait entrepris la publication d'un annuaire qui contenait de nombreux articles originaux et des comptes rendus de livres. Le premier volume avait 282 pages, le 4e (en 1902) en comptait 980, le 5e (en 1903) 1.368, le 6e (en 1904) 744, et celui de 1905, 1.084. Rien d'étonnant si l'on trouve peu de choses dans les Trois Essais de Freud que l'on ne puisse reconnaître dans les faits, les théories et les spéculations contenues dans ce déluge de littérature. » (p. 425s)
Comme nous l’avons dit, Freud a une opinion très négative de la masturbation. A ma connaissance, il n’a jamais écrit que « cela devient “anormal” lorsque ça tourne à la manie fétichiste. » De toute façon, Freud entendait par « fétichisme » ce qu’on peut lire aujourd’hui dans le Petit Robert : « Perversion sexuelle dans laquelle la satisfaction sexuelle est recherchée par le contact ou la vue de certains objets normalement dénués de signification érotique ». Mme Roudinesco utilise ici un terme psychiatrique de façon inappropriée.
4. « Toutes les dictatures vont bannir le freudisme, comme théorie de la liberté humaine. »
V.R. :
Il faudrait écrire « beaucoup » de dictatures. En effet, plusieurs psychanalystes — par exemple Boehm et Müller-Braunschweig — rallièrent la cause nazie et continuèrent à travailler comme psychanalystes au sein de l'Institut Göring [14].
Mme Roudiensco écrit elle-même : « Les dictatures militaires n'ont pas empêché l'expansion de la psychanalyse en Amérique latine (notamment au Brésil et en Argentine) [15] ». L'Argentine, sous le régime des généraux, n'en était pas moins, selon l’expression d’un psychanalyste, « l'Eldorado de la psychanalyse [16] »
Pour en savoir plus sur le sujet, voir le livre de M. Plotkin (2010) Histoire de la psychanalyse en Argentine. Une réussite singulière, paru dans une collection d’écrits psychanalytiques (CampagnePremière). L’historien argentin écrit en conclusion :
« La grande majorité des psychanalystes se sont retranchés derrière “la neutralité analytique” et sont restés confinés dans leurs cabinets. Ils estimaient que la cure est un espace où toute question peut être résolue de façon privée. Ils partageaient même l’idée que leur mission était d'aider les patients à s'adapter à l'environnement dans lequel ils vivaient, et considéraient que se prononcer sur la qualité de cet environnement — et, à plus forte raison, le changer — n'était pas de leur ressort » (p. 352).
Pour un aperçu de son livre : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article1529
François Roustang, qui vécut pendant des années l'aventure lacanienne, écrit au sujet des prétendus effets subversifs de la psychanalyse :
« La psychanalyse gêne le pouvoir absolu, mais pas plus, ou peut-être beaucoup moins, que quelques hommes d'église incapables de supporter l'esclavage, qu'un syndicat animé par la justice, qu'un groupuscule d'étudiants décidés qui ne redoutent pas la mort »[17].
5. « Avec la création de l’International Psychoanalytical Association (IPA) en 1910, ce mouvement d’émancipation [la psychanalyse] s’est transformé en une Eglise laïque, avec des règles pour la cure et une nouvelle morale orthodoxe… »
V.R. :
Freud a décidé en 1910 de créer une association visant à protéger sa pratique contre ceux qui faisaient de l’analyse freudienne sans se soumettre à son autorité[18]. Progressivement s’est instaurée l’obligation d’une psychanalyse didactique pour être reconnu membre de son association. Notons bien que l’aspect « Église » ou « religion » laïque est apparu très tôt. Déjà en 1910, le célèbre psychiatre Eugen Bleuler — qui avait été un temps très intéressé par le travail de Freud — qualifiait le groupe des psychanalystes de « secte intolérante ». Peu après, Alfred Hoche, professeur de psychiatrie à Fribourg, parlait d'« une secte fanatique obéissant aveuglément à son chef ». En 1920 Havelock Ellis, avec lequel Freud avait entretenu une correspondance amicale, écrivait : « Il est malheureux que Freud ait d'abord été le chef d'une secte, sur le modèle des sectes religieuses »[19].
6. « La psychanalyse a été violemment attaquée par les scientistes, pour lesquels il n’y a pas de psychisme hors des neurones et du fonctionnement cérébral. Quand la psychiatrie devient comportementaliste, elle exclut l’inconscient, la sexualité, le transfert, le désir, au profit d’une classification des comportements. La caractéristique des comportementalistes, c’est la détestation des religions, et pour eux, la psychanalyse est une religion et les psychanalystes, des prêtres masqués. Ils aiment certaines formes de religiosité qui ne sont pas la religion, comme par exemple la méditation transcendantale, en tant qu’outil technique. »
V.R. :
a) Pour Mme Roudinesco, les critiques de la psychanalyse ne viennent pas de philosophes, d’épistémologues ou de vrais scientifiques. Elles ne peuvent venir que de « scientistes », c’est-à-dire des personnes bornées pour qui seule la science peut dire des choses pertinentes.
En réalité, des critiques radicales ont été énoncées par des philosophes et des épistémologues, par exemple Popper, Wittgenstein, Grünbaum, mais également par des historiens qui ont découvert à quel point Freud avait menti : Ellenberger, Sulloway, Borch-Jacobson, Han Israëls, Swales.
Bien sûr des critiques ont été énoncées depuis longtemps par des psychologues scientifiques (Eysenck étant le plus célèbre). Pour toutes ces personnes, le psychisme ne se ramène nullement aux neurones et au fonctionnement cérébral !
Quant aux neuropsychologues qui, eux, s’occupent avant tout du rapport entre les comportements et le fonctionnement cérébral, ils ont peu parlé de la psychanalyse. Quelques psychanalystes ont cherché dans la neuropsychologie des arguments en faveur de la théorie freudienne. Un psychanalyste réputé, Pierre Fédida parlait à ce sujet de « canular »[20]. Bon nombre de freudiens orthodoxes sont du même avis, comme on le constate à lire les revues les plus cotées de la discipline, le Journal of the American Psychoanalytic Association[21] ou l’International Journal of Psychoanalysis[22]. Pour en savoir plus :
Rappelons que Mme Roudinesco n’a pas fait d’études de psychologie et qu’elle ignore les notions élémentaires de la psychologie scientifique[23].
b) En 2009, Mme Roudinesco ne sait toujours pas ce qu’est le comportementalisme[24].
Rappelons qu’il s’agit d’une façon de faire de la psychologie qui se caractérise non par un contenu théorique, mais par une méthode : il s’agit d’observer scientifiquement des comportements et leurs déterminants.
La notion de « comportement » constitue l’unité d’observation, plutôt que la notion d’ « âme ». Mme Roudinesco, elle, est une « animiste » : elle n’a que faire des observations de comportements, elle ne s’intéresse qu’à l’« âme », une âme « masquée », que seul le freudien peut révéler.
c) Le comportementaliste, selon elle, « exclut l’inconscient, la sexualité, le transfert, le désir, au profit d’une classification des comportements ».
On aimerait voir des citations référencées de publications de comportementalistes « excluant » tout cela ! On comprend que Mme Roudinesco n’en donne pas dans une interview, mais elle n’en donne pas davantage dans ses publications. Je pense qu’elle n’a jamais lu un seul livre d’un comportementaliste reconnu par ses pairs [25].
Exclure l’inconscient ?
Exclure l’idée qu’il y a un Autre en nous dont nous ne sommes que la marionnette : oui [26]. Par contre, tous les comportementalistes estiment qu’en pensant et en agissant nous ne sommes pas conscients de tout ce que nous faisons et de tous les déterminants de ce que nous faisons. En 74 pages, j’ai fait une mise au point sur cette question dans mon livre Psychologie de la vie quotidienne (Odile Jacob, 2003). J’y ai montré que l’idée de processus inconscients apparaît dans la psychologie scientifique avant même que Freud n’ait écrit une ligne à ce sujet !
Exclure la sexualité ?
Tout à fait ridicule. Contentons-nous de citer un livre récent, qui est un plaidoyer pour une sexualité heureuse et qui montre que les comportementalistes s’intéressent à la sexualité depuis le début de ce mouvement : La sexualité des gens heureux, de Pascal de Sutter (Paris, Les Arènes, 262 p.)
Exclure le transfert ?
Tout dépend de ce que l’on entend par cette notion qui a plusieurs sens. Rappelons quelques énoncés de Freud qui en disent long sur le conditionnement opéré durant les cures :
« Dans notre technique, nous avons abandonné l'hypnose que pour redécouvrir la suggestion sous les espèces du transfert. (…) Nous accordons que notre influence repose pour l'essentiel sur le transfert, donc sur la suggestion.[27] »
« Il est tout à fait vrai que la psychanalyse travaille aussi par le moyen de la suggestion, comme d'autres méthodes psychothérapeutiques. Mais la différence est qu'ici on ne s'en remet pas à celle-ci — suggestion ou transfert — pour décider du succès thérapeutique. Elle est bien plutôt utilisée pour inciter le malade à produire un travail psychique.[28] »
Il est évident que les comportementalistes admettent que les conduites actuelles dépendent de relations passées, que des attitudes façonnées autrefois sont en quelque sorte transférées aux attitudes d’aujourd’hui.
Exclure le désir ?
De quel désir s’agit-il ? Les comportementalistes accordent de l’importance au désir sexuel (je suppose que c’est essentiellement celui-là auquel songe Mme Roudinesco), mais aussi au désir d’affection, d’être estimé, d’être compétent, de vivre conformément à ses valeurs, de voir ses proches s’épanouir, de faire des expériences esthétiques, etc.
d) « La psychiatrie exclut […] au profit d’une classification des comportements »
Voilà une rengaine qui ne correspond nullement à la réalité observable de la pratique comportementale. Les comportementalistes se réfèrent à des catégories clairement définies quand il s’agit de faire de la recherche, de faire un pronostic et de choisir une forme de thérapie plutôt qu’une autre. Leurs catégories sont autrement plus nuancées que la dizaine de catégories que Freud et ses disciples utilisent à tout bout de champ : névrosé, hystérique, obsessionnel, narcissique, pervers. Mme Roudinesco emploie d’ailleurs, dans son interview, les deux premiers termes cités. Pour des détails, voir : http://www.pseudo-sciences.org/spip.php?article2025
e) Mme Roudinesco écrit que « La caractéristique des comportementalistes, c’est la détestation des religions, et pour eux, la psychanalyse est une religion et les psychanalystes, des prêtres masqués. »
La caractéristique des comportementalistes est le refus des pseudo-explications mentalistes du genre « il est agressif parce qu’il a une pulsion de mort » au profit d’observations méthodiques des comportements (« il est agressif parce qu’il a appris à réagir de cette façon dans telles situations et qu’il est régulièrement provoqué »…).
Il y a des comportementalistes qui détestent la religion et d’autres qui sont croyants, comme chez les psychanalystes.
Que la psychanalyse apparaisse comme une religion, Mme Roudinesco, en déclarant un peu plus haut que la psychanalyse s’est transformée en une Eglise laïque, semble toute prête à l’admettre. Je répète que cette transformation s’est faite dès les années 1910.
f) Mme Roudinesco ajoute qu’ « ils aiment certaines formes de religiosité qui ne sont pas la religion, comme par exemple la méditation transcendantale, en tant qu’outil technique ».
Ridicule. Un certain nombre de comportementalistes utilisent des méthodes de méditation, qu’ils ont rebaptisées « mindfulness » ou « pleine conscience », qui n’ont rien à voir avec la méditation « transcendantale » du gourou Maharishi Mahesh Yogi. S’ils utilisent cette technique qui trouve son inspiration dans le bouddhisme, ce n’est pas parce qu’ils « aiment certaines formes de religiosité », mais parce que des observations méthodiques ont montré que cette pratique a de réelles possibilités psychothérapeutiques. A toutes fins utiles, je renvoie à un excellent ouvrage sur le sujet, écrit par un ancien psychanalyste devenu comportementaliste, Frédéric Rosenfeld : Méditer, c'est se soigner (Paris : Les Arènes, 2007, 350 p.)
7. « Le problème, c’est que la psychanalyse est une théorie philosophique et que l’on ne parle pas le même langage que les scientifiques. »
V.R. :
La psychanalyse joue habituellement sur deux tableaux : elle se présente tantôt comme une science, tantôt comme une anthropologie philosophique. Je suis heureux que Mme Roudinesco tranche comme elle le fait.
Je rejoins Mme Roudinesco sur ce point. Les théories freudiennes et lacanienne sont des formes de psychologie philosophique, raison pour laquelle elle a intéressé bien des philosophes (Politzer, Dalbiez, Ricœur et al.), raison pour laquelle Michel Onfray devait tôt ou tard la présenter à l’Université populaire de Caen.
Rappelons toutefois que Freud écrivait : « La psychanalyse est une science empirique. Ce n'est pas un système à la manière de ceux de la philosophie »[29] ; « Comme toute autre science de la nature (Naturwissenschaft), la psychanalyse repose sur une élaboration patiente et laborieuse de faits du monde perceptif »[30].
Freud ne tenait pas en haute estime la philosophie, du moins dans ses conversations privées. Il disait par exemple à Binswanger : « La philosophie est une des formes les plus convenables de sublimation d'une sexualité refoulée, rien de plus »[31].
De son côté, Lacan disait à la fin de sa vie : « La psychanalyse est à prendre au sérieux, bien que ce ne soit pas une science. Comme l'a montré abondamment un nommé Karl Popper, ce n'est pas une science du tout parce que c'est irréfutable. C'est une pratique, une pratique qui durera ce qu'elle durera. C'est une pratique de bavardage[32]. »
8. « Les cognitivo-comportementalistes sont apolitiques, ils sont pour le libéralisme absolu en matière de mœurs, puisqu’ils nient toute fonction symbolique. Leur philosophie spontanée, c’est le “jouir le mieux possible”, tempéré par l’évaluation : un cauchemar moderne qui transforme les hommes en “choses”. »
V.R. :
a) « Apolitiques » ?
En effet, le comportementalisme, qui se veut une psychologie d’orientation scientifique n’est ni de droite, ni de gauche. Notons toutefois que le pays au monde où le courant cognitivo-comportemental s'est le mieux développé c’est la Hollande, un des pays les plus démocratiques de la planète.
b) « Libéralisme absolu en matière de mœurs » ?
Je reste bouche bée. Où Mme Roudinesco est-elle allée chercher cette affirmation ? On voudrait des preuves, des citations précises, des témoignages crédibles…
c) La négation de la fonction symbolique ?
La science du comportement s’intéresse depuis des lustres au symbolique et à l’imaginaire. Rien de ce qui est humain ne lui est étranger. Mme Roudiensco ignore sans doute que par exemple Skinner a publié en 1957 un livre de 478 pages sur le langage[33].
d) « Jouir le mieux possible » ?
Mme Roudinesco dit, dans cette même interview, que le comportementaliste exclut la sexualité, le désir. La logique n’a jamais été son fort.
e) L’évaluation serait un cauchemar moderne, qui transformerait les hommes en « choses ».
Pour autant que je sache, on évalue pas mal de choses depuis longtemps : les acquis scolaires, les dommages causés par un traumatisme, l’effet des médicaments, la rapidité d’une guérison d’une maladie, le pourcentage de rechutes…
Dans le domaine de la psychothérapie, l’idée d’évaluer les effets s’est développée surtout à partir des travaux d’Eysenck publiés en 1952.
Certes, on ne peut pas tout « mesurer » de façon rigoureuse, mais on peut toujours évaluer des évolutions. Par exemple, le degré d’agoraphobie. Un patient peut ne plus oser sortir de chez lui, ne plus oser prendre le métro, ne plus oser quitter sa ville … On peut « mesurer » si la thérapie lui permet d’augmenter son degré de liberté de circuler.
Si l’on refuse toute évaluation en psychothérapie, il faut admettre que tout se vaut, que c’est le règne de la subjectivité absolue. Autant alors choisir résolument ce qui est le moins cher et le plus rapide, c’est-à-dire précisément les TCC.
Mme Roudinesco, sous prétexte de sauver « l’âme », veut sauver les privilèges de la corporation freudienne.
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Le Monde des Religions, juillet-août 2009, n° 36, p. 44-45.
(Dossier : Le sexe et les religions)
http://www.le-monde-des-religions.fr/articles/la-revolution-freudienne.html
La révolution freudienne
Entretien avec Elisabeth Roudinesco,
historienne et psychanalyste
Au XIXe siècle, le traitement clinique de la sexualité s’inscrit de la tradition bourgeoise et chrétienne.
Freud luttera contre cette morale et ses carcans liés aux interdits religieux.
Un bouleversement aujourd’hui remis en cause.
Tout au long du XIXe siècle, avec l’apparition de la psychiatrie d’abord, puis de la psychologie clinique, le pouvoir anciennement dévolu au prêtre est progressivement transféré au médecin…
Le médecin va en effet prendre en charge la sexualité et le traitement des déviants. On s’occupe de plus en plus de la sexualité, non pas du point de vue du jugement divin mais de la reproduction, de la biologie et du désir. Ainsi sort-on d’un monde dominé par la puissance patriarcale et où les mariages étaient arrangés. Au lieu de traiter la question morale, au sens de la foi chrétienne, la bourgeoisie s’intéresse au sexe biologique et elle réinjecte la question sexuelle au cœur de cette nouvelle conception scientifique du sexe, construite sur la base du savoir médical. Dans la deuxième moitié du siècle, on s’intéresse particulièrement au développement de la sexualité infantile, à la femme hystérique et à l’homosexuel. Autrement dit, on s’occupe de l’anomalie. L’enfant doit être normalisé. On invente des appareils pour l’empêcher de se masturber. C’est la morale médicale qui est évidemment dans une continuité avec la morale bourgeoise, à la fois chrétienne et biologique.
Et que fait Freud ?
La théorie freudienne est, du point de vue de la sexualité, une révolution. Freud change le regard sur la sexualité. Aussi sera-t-il accusé, par toutes les religions, particulièrement le catholicisme, d’être un profanateur de la famille, un dynamiteur de la société, un démon darwinien et un obsédé sexuel. Pourquoi ? Parce qu’il considère que la société bourgeoise bride le désir sexuel. Au lieu de pointer du doigt l’anormalité, il va montrer que tous les conflits à l’origine de l’être humain sont au départ sexuels et liés au désir. Si les femmes de cette époque sont hystériques, c’est parce qu’elles ont des frustrations, non parce qu’elles sont anormales… Freud est un matérialiste, qui considère la sexualité comme un phénomène à la fois psychique et biologique. Il n’est pas un théoricien de la liberté sexuelle à tout prix, mais un émancipateur qui lutte contre la morale de son époque, trop patriarcale, avec ses carcans liés aux interdits religieux. Jusqu’en 1897, date à laquelle il élabore sa première théorie sexuelle, il voit beaucoup de femmes qui disent avoir subi des abus. La névrose adulte, pense-t-il d’abord, vient de traumatismes sexuels réels, et puis il s’aperçoit que si certaines femmes ont véritablement connu un abus, d’autres l’ont sincèrement imaginé : il invente ainsi la notion de fantasme. Il démontre donc que nous avons tous des problèmes sexuels dans la tête et pas seulement dans le corps ! C’est bien plus subversif ! Cela sera aussi très déstabilisant pour la civilisation de découvrir ce que les enfants désirent vraiment, quand ils élaborent des « théories » très crues sur les rapports sexuels et la naissance. Il fera ainsi scandale en 1905, en affirmant qu’il est parfaitement normal pour un enfant de se masturber et que tous les enfants ont une sexualité pulsionnelle. Cela devient « anormal », lorsque ça tourne à la manie fétichiste.
L’Eglise catholique condamne, jusqu’en 1945, l’œuvre de Freud, au même titre que celle de Marx. Pourquoi ?
Car le communisme et la psychanalyse sont les deux ferments, pour l’Eglise, de la liquidation de la morale chrétienne : deux théories matérialistes élaborées par des Juifs hostiles à la religion. De même, toutes les dictatures vont bannir le freudisme, comme théorie de la liberté humaine. Par la suite, l’Eglise catholique romaine changera de doctrine, en introduisant l’expertise psychiatrique pour le discernement des vocations. L’Eglise n’a alors plus envie d’accueillir des pervers sexuels et des homosexuels refoulés dans ses rangs. On se fie dès lors aux théories psychiatriques, dominées à l’époque par celles de Freud. A la faveur de cette introduction, les jésuites et les dominicains se passionneront pour l’exploration de soi. Et à l’intérieur de l’expérience psychiatrique pour les novices, ils introduiront les cures psychanalytiques.
Sur les questions sexuelles, après avoir longtemps été l’ennemie des dogmes religieux, la psychanalyse n’a-t-elle pas tendance, depuis une vingtaine d’années, à se rapprocher du conservatisme moral de l’Eglise ?
La transformation s’est opérée en plusieurs temps, chez toutes les tendances des psychanalystes : kleiniens, lacaniens, lesquels sont les héritiers de Freud. Avec la création de l’International Psychoanalytical Association (IPA) en 1910, ce mouvement d’émancipation s’est transformé en une Eglise laïque, avec des règles pour la cure et une nouvelle morale orthodoxe… Après avoir été critiquée par les Eglises pour des raisons morales, la psychanalyse a été violemment attaquée par les scientistes, pour lesquels il n’y a pas de psychisme hors des neurones et du fonctionnement cérébral. Quand la psychiatrie devient comportementaliste, elle exclut l’inconscient, la sexualité, le transfert, le désir, au profit d’une classification des comportements. La caractéristique des comportementalistes, c’est la détestation des religions, et pour eux, la psychanalyse est une religion et les psychanalystes, des prêtres masqués. Ils aiment certaines formes de religiosité qui ne sont pas la religion, comme par exemple la méditation transcendantale, en tant qu’outil technique.
Se sentant menacés, les psychanalystes se seraient donc naturellement rapprochés de l’Eglise ?
Oui et non. Non, car ils sont en général athées. Oui, car le débat avec les représentants des neurosciences est devenu, hélas, inopérant, à force de conformisme : ne parler que de sérotonine ou de circuits cérébraux, cela devient très ennuyeux. Aujourd’hui, les psychanalystes risquent d’être assignés à servir de supplétifs à tout ce qu’on ne peut pas traiter par les médicaments. Et donc, ce n’est guère intéressant du point de vue de la réflexion théorique. Le problème, c’est que la psychanalyse est une théorie philosophique et que l’on ne parle pas le même langage que les scientifiques, lesquels d’ailleurs dénoncent eux-mêmes les dérives scientistes de leurs disciplines. Le rapprochement des psychanalystes avec les idéaux de la vieille morale chrétienne, du fait de la pauvreté des débats avec la science, a eu des conséquences dramatiques. Ils sont passés à côté des grands débats sur les nouvelles formes de sexualité. On a vu les psychanalystes s’arc-bouter sur un conservatisme le plus étriqué, notamment à propos de l’homosexualité, du Pacs et des nouvelles formes de filiation : « On ne touche pas à notre théorie du père, il est impossible que deux personnes du même sexe élèvent un enfant, on a besoin d’un papa et d’une maman ! » A l’opposé, les cognitivo-comportementalistes sont apolitiques, ils sont pour le libéralisme absolu en matière de mœurs, puisqu’ils nient toute fonction symbolique. Leur philosophie spontanée, c’est le « jouir le mieux possible », tempéré par l’évaluation : un cauchemar moderne qui transforme les hommes en « choses ». Cela n’est pas pensable, avec la psychanalyse qui pose que l’être humain est soumis à la Loi (au sens juridique et symbolique), la Loi en tant qu’elle garantit la liberté de chacun, sans pour autant autoriser la barbarie de la jouissance pulsionnelle illimitée. Mais de nombreux psychanalystes ont confondu cette conception de la Loi avec la défense d’un vieux souverainisme étriqué fondé sur le culte du père comme équivalent de l’Etat-nation.
Propos recueillis par Jennifer Schwarz
[1] L’hérédité et l’étiologie des névroses (1896) Œuvres complètes. PUF, 1989, III, p. 114.
[2] La sexualité dans l'étiologie des névroses (1898) Œuvres complètes. PUF, 1989, III, p. 217.
[3] Une formule qui fait songer immanquablement à celles du docteur Knock : « Les gens bien portants sont des malades qui s’ignorent », « La santé n’est qu’un mot, qu’il n’y aurait aucun inconvénient à rayer de notre vocabulaire ».
[4] Trois essais sur la théorie de la sexualité (1905) Trad. Gallimard, coll. Idées, 1962, VIII, p. 61.
[5] La morale sexuelle “culturelle” et la nervosité moderne (1908) Œuvres complètes. PUF, p. 163s
[6] Voir par exemple “L’hérédité et l’étiologie des névroses” (1896), cité à la note 1.
[7] « Was Freud a liar ? », The Listener, 7 févr. 1974, p. 172-74, rééd. dans Crews F., éd., Unauthorized Freud, New York, Viking, 1998, p. 34-42).
[8] En langue anglaise, le lecteur a l’embarras du choix. Citons quelques publications en français : R. Webster (1998) Le Freud inconnu. L'invention de la psychanalyse, trad., éd. Exergue, 1998 - J. Bénesteau, (2002) Mensonges freudiens : Histoire d'une désinformation séculaire. Mardaga, (voir chap. 12) - C. Meyer et al. (2005) Le livre noir de la psychanalyse. Paris : Les arènes, 830 p. – M. Borch-Jacobsen & S. Shamdasani (2006) Le dossier Freud. Enquête sur l’histoire de la psychanalyse. Paris : Les Empêcheurs de penser en rond, 510 p.
[9]. L'hérédité et l'étiologie des névroses (1896), Œuvres complètes, PUF, III, p. 117.
[10]. Sur l’étiologie de l’hystérie (1896), Œuvres complètes, PUF., III, p. 180.
[11] Nouvelles conférences sur la psychanalyse (1933), trad. Gallimard, p. 161.
[12] L’interprétation des rêves (1900), trad. PUF, 1967, p. 419.
[13] Ellenberger, H. (1970) The Discovery of the Unconscious. The History and Evolution of Dynamic Psychiatry. New York, Basic Books. 932 p. Trad.: A la découverte de l'inconscient. Histoire de la psychiatrie dynamique. Villeurbanne: Ed. Simep, 1974, 780 p. Rééd.: Histoire de la découverte de l'inconscient. Paris: Fayard, 1994, 976 p. Voir pages 652s.
[14] Kaltenbeck F. (1983) Un trauma. Les psychanalystes et le nazisme. L'Ane. Le magazine freudien, 10, p. 27.
[15] Pourquoi la psychanalyse? Fayard, 1999, p. 172.
[16] Leclaire S. et l'A.P.U.I.P. (1991) Etats des lieux de la psychanalyse. Albin Michel, p. 215.
[17] ... Elle ne le lâche plus. Paris : Minuit, p. 175.
[18] Voir Sonu Shamdasani (2005) Psychanalyse, marque déposée. In C. Meyer et al. (2005) Le livre noir de la psychanalyse. Paris : Les arènes, p. 162-77. Ed. 10/18, p. 205-225.
[19] Pour les références précises de ces citations, voir J. Van Rillaer (1980) Les illusions de la psychanalyse. Mardaga, 4e éd.,1996, p. 247s.
[20] Fédida, P., Le canular de la neuropsychanalyse. La Recherche. Hors série, 2000, n°3.
[21] Pulver, S., On the astonishing clinical irrelevance of neuroscience. Journal of the American Psychoanalytic Association, 2003, 51 : 755–772.
[22] R. Blass & Z. Carmeli, The case against neuropsychoanalysis. On fallacies underlying psychoanalysis’s latest scientific trend and its negative impact on psychoanalytic discourse. International Journal of Psychoanalysis, 2007, 88 : 19–40.
[23] Illustration. Mme Roudinesco écrit : « la psychologie cognitive se veut scientifique en prétendant faire dépendre du cerveau non seulement la production de la pensée, mais l'organisation psychique consciente et inconsciente. » (Pourquoi la psychanalyse ?, p. 95). Tout étudiant, qui a réussi une première année de psychologie dans mon pays, sait que la psychologie cognitive se définit comme l’étude des fonctions cognitives (mémoire, pensée, etc.) et se veut scientifique parce qu’elle utilise la méthode scientifique pour étudier ces fonctions. Je suppose que les étudiants français le savent également.
[24] Dans Pourquoi la psychanalyse ?, Mme Roudinesco écrivait (p. 95) : “Le béhaviorisme est une variante du comportementalisme”, ce qui revient à dire que le skate-bord est une variante de la planche à roulette. En fait, le terme comportementalisme est synonyme de l'anglicisme béhaviorisme, ce que savent TOUS les psychologues universitaires ou ceux qui consultent Le petit Robert.
[25] Rappelons que le titre de « comportementaliste » n’a pas plus de valeur légale que celui de « psychanalyste ». N’importe qui peut l’utiliser, quelle que soit sa formation ou sa non-formation. Quand on parle du freudisme, il faut se référer à Freud et à ses principaux disciples. Quand on parle du « comportementalisme », il faut se référer aux noms reconnus de ce courant dans les milieux universitaires.
[26] C’est ce que les épistémologues appellent, depuis les travaux de G. Ryle, « l’erreur de l’homonculus ». Voir J. Bouveresse (1991) Philosophie, mythologie et pseudo-science. Wittgenstein lecteur de Freud. Ed. de l'éclat, 141 p.
[27] Conférences d'introduction à la psychanalyse (1917) Gallimard, 1999, p. 566 & 569.
[28] Sigmund Freud présenté par lui-même (1925) Gallimard, 1984, p. 71 (italiques de Freud).
[29] “Psychoanalyse” und “Libidotheorie” (1923), Gesammelte Werke, Fischer, XIII, p. 229.
[30] Die Widerstände gegen die Psychoanalyse (1925), Gesammelte Werke, Fischer, XIV, p. 104.
[31] Binswanger, L. (1966) Discours, parcours, et Freud. Trad., Gallimard, p. 277.
[32] “Une pratique de bavardage”, Ornicar? Bulletin périodique du champ freudien, 1979, 19, p. 5
[33] Verbal behavior. Appleton-Century-Crofts, 1957, 478 p.
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Psychanalystes, dehors ! Et, pour vivre heureux, vivons cachés.
Les années 2020 seront celles de l'avènement d'une nouvelle forme de totalitarisme : le totalitarisme sophistiqué dont l'un des traits les plus marquants est cette lutte, cette haine tout à fait scandaleuse et révoltante contre la liberté d'expression, via un combat acharné contre ce qui est nommé le "conspirationnisme" ou le "complotisme".
Les années 2020 seront sans doute identifiées dans l'Histoire comme une "période charnière" entre la fin d'un "ancien monde" et la naissance d'un "nouveau" dont les prémices se révèlent de plus en plus menaçants pour les libertés individuelles.
Nous estimons qu'il est pertinent, plus que jamais, de citer Antonio Gramsci :
"Le vieux monde se meurt, le nouveau est lent à apparaître. Et c'est dans ce clair-obscur que surgissent les monstres".
Mais citons Karl Popper : "L'optimisme est toujours de rigueur".
Et nous-mêmes : "Restons citoyens, restons vigilants, mais, renonçons à la violence et à l'intolérance. Travaillons à sauvegarder la citoyenneté, à en améliorer le contenu et les pouvoirs, les libertés autant que les responsabilités".