vendredi 24 février 2017

Georges POLITZER. Sur "l'inconscient", en psychanalyse.




« A la faveur du prestige dont jouit l’inconscient, les psychologues croient volontiers que, dans les faits qui sont cités habituellement comme les preuves de l’inconscient, ce dernier apparaît d’une façon si directe et si immédiate qu’il est même plus indiqué de parler de constatation que d’hypothèse. S’il en était ainsi, si l’inconscient était réellement une constatation, ou au moins une hypothèse écrite dans les faits eux-mêmes et par conséquent irrésistible, nous n’aurions évidemment rien à dire. Et inversement, tant que cette croyance subsiste, on peut se méfier avec raison de toute critique de l’inconscient. Voilà pourquoi il est indispensable de montrer par une revue aussi générale que possible qu’il y a entre les faits d’une part, et la notion d’inconscient d’autre part, une distance assez grande pour qu’il soit possible de parler de déformation et de poser ensuite le problème de la légitimité de cette dernière. En d’autres termes, il faut commencer par montrer rapidement que les faits cités comme preuves de l’inconscient ne le deviennent que grâce à un certain nombre de démarches et d’exigences qui se trouvent être précisément celles qui constituent l’abstraction. »



(In : Georges Politzer. « Critique des fondements de la psychologie ». Editions PUF, Paris, Quadrige, 2003, page : 159).










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Commentaires :

Voici quelques arguments qui peuvent encore appuyer les propos de Georges Politzer. Encore une fois, nous utiliserons la théorie de la vérité comme correspondance avec les faits, rendue célèbre par le mathématicien Alfred Tarski, et reprise par Karl Popper.

A l’aide de l’exemple général qui va suivre, chacun pourra comprendre aisément en quoi consiste cette théorie de la vérité comme correspondance avec les faits, ou, en d’autres termes : « un jugement est vrai, s’il correspond aux faits ».

Supposons qu’un groupe de personne assez nombreux, (mais, comme l’on va s’en rendre compte, peu importera le nombre), se trouve dans une région montagneuse où l’on peut y voir de la neige, et la toucher. A propos de la couleur de la neige, que pourraient dire toutes les personnes présentes, en l’observant ? Et bien : « que la neige est blanche ». Nous appellerons cet énoncé, l’énoncé, P.

Or, P, est-il une constatation, une hypothèse, ou une preuve que « la neige est blanche » ? Pour la plupart des gens, qui ignoreraient les règles de la logique, et aussi de l’épistémologie et de la méthode scientifique, nul doute qu’ils attribueraient à P, toute la valeur d’une « constatation d’emblée prouvée par les faits observables », et qu’il serait, par conséquent, parfaitement inutile, sinon ridicule, de soumettre P à des tests indépendants, donc, de « prouver », P.

Mais voici ce que propose la théorie d’Alfred Tarski :

P, n’est pas une preuve, ni même une constatation, « d’emblée prouvée par les faits observables », mais seulement une hypothèse que l’on aura tendance à tenir comme un fait avéré, sans aucune mise à l’épreuve.

Selon la théorie de Tarski, que nous faut-il pour soumettre P à l’épreuve, et la corroborer (ou la réfuter) ? Et bien, il suffit que nous disposions d’un autre énoncé, « sur », l’énoncé P, ou « à propos » de P.

Par cette voie, P, devient ainsi l’objet d’une évaluation. Et, en tant que tel, il devient un « énoncé objet ». Objet pour un autre énoncé, situé « au-dessus de lui », donc un « metaénoncé », P’, qui pourrait être formulé de la manière suivante : « est-il vrai que la neige est blanche ? ».

Il s’agit ensuite, de prélever un échantillon de la neige observée par tous les témoins présents, puis de l’apporter dans un laboratoire spécialisé, où des expérimentateurs, pourront, à l’aide d’un savoir acquis sur la neige, et donc, à partir de certaines conditions initiales d’expérimentations déjà éprouvées ; vérifier qu’il s’agit bien d’une neige naturelle, et que sa couleur est bien blanche.

Voilà, en somme, toute la méthode qui a toujours manqué à la psychanalyse, et qui lui manque encore.

La psychanalyse, depuis toujours, tient la théorie de l’inconscient, comme une hypothèse allant de soi, (donc pas du tout comme une hypothèse, en fin de compte), comme une vérité révélée incontestable, et qui se constate « partout où l’on regarde » dans tout ce que peut faire ou penser, etc., un être humain. Rien n’est exclut par cette théorie délirante de l’inconscient, d’autant plus qu’elle se fonde, également depuis toujours, sur le postulat non valide d’un déterminisme psychique inconscient, prima faciae absolu, parce qu’il exclut, a priori, tout hasard et tout non-sens, dans toute causalité psychique inconsciente.

(Patrice Van den Reysen. Tous droits réservés).



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