samedi 13 décembre 2014

Karl POPPER : Le savoir et son indéterminisme.





« Seul le cerveau humain (ou peut-être devrais-je dire l’esprit humain) est capable de créer des intérêts, des buts, des problèmes et des finalités, même à l’intérieur du champ relativement restreint de ses activités intellectuelles.

Un autre argument pourrait être le suivant : nous apprenons grâce à  nos erreurs ; cela signifie que quand nous aboutissons à des incohérences nous faisons marche arrière et nous reformulons nos hypothèses. En appliquant cette méthode, nous pouvons aller jusqu’à réexaminer des suppositions même de nature logique, si cela s’avère être nécessaire. (C’est ce qui s’est passé dans le cas des paradoxes logiques). Il est difficilement concevable qu’une machine puisse faire de même. Si ces créateurs, par imprudence, l’équipaient avec des incohérences, elle produirait alors, avec le passage du temps, tous les énoncés qu’elle pourrait former (et leur négation). Nous pourrions peut-être la munir d’un gadget qui la préviendrait, dans le cas où elle afficherait « 0 = 1 », et qui la ferait abandonner certaines de ses hypothèses. Mais nous pourrons difficilement construire une machine qui puisse critiquer et réajuster ses propres méthodes de déduction logique.

Le résultat général de nos considérations semble être la remise en place d’une vue naïve du monde, décrite comme : « optique selon le bon sens » dans la section 1, optique d’après laquelle il y a des événements que l’on peut prédire ou qui sont « déterminés », et d’autres que l’on peut prédire et qui ne sont pas « déterminés ».

Mais nos réflexions suggèrent même quelque chose comme une réconciliation entre cette optique et l’autre, « plus sophistiquée », selon laquelle, en général, c’est seulement un manque de savoir qui nous fait croire que les événements sont imprévisibles.

On peut réaliser cette réconciliation si l’on se rend compte que c’est l’existence du savoir dans le monde physique – ou, plutôt, d’événements physiques qu’on peut interpréter comme représentant le savoir, ou résultant du savoir – qui crée cette sorte d’indéterminisme dont nous avons parlé ici. Le savoir peut conquérir de nouveaux problèmes. Mais, ce faisant, il va aussi créer de nouveaux problèmes qu’il ne pourra résoudre immédiatement. Car il ne peut prévoir ses propres conquêtes futures. »

(In : Karl POPPER, « L’univers irrésolu. Plaidoyer pour l’indéterminisme », éditions Hermann, Paris, 1984, pages : 90 – 91).



*                                                            *                                                          *



Commentaires :

Il n'y aura pas de réconciliation, puisqu'il n'y a jamais eu de conciliation avec la psychanalyse, et du reste aucune conciliation n'est possible avec elle.

Nous rejetons la psychanalyse, parce qu'elle doit être (rationnellement) et entièrement rejetée.

La psychanalyse peut avoir des arguments de "bons sens", mais qui n'en a pas! Dans ces arguments là, on trouve une cohérence, mais la cohérence est-elle un gage de correspondance avec les faits ? Certes non. D'ailleurs, selon nous, elle s'attache surtout à construire des idées "cohérentes", afin qu'elles produisent un massif effet d'influence et de suggestion sur… le bon sens ; et afin de produire ensuite une sorte de stimulation et d'attirance vers son  irrationalité de fond, en tentant de stimuler la "pensée" (…) inductiviste,  notamment, croyant à tort que c'est par ce moyen que se trouve un chemin sûr vers une prétendue rationalité salvatrice qu'elle serait la seule à avoir exprimée. Ce faisant, chez les esprits mal informés en épistémologie, elle stimule toujours plus la croyance erronée et délirante en l'apriorisme absolu qui demeure l'irrationalité de fond de la psychanalyse, derrière sa façade de cohérences et de bon sens.

L'indéterminisme, sa compréhension, toujours alliée à une vigilance épistémologique est la seule voie permettant d'échapper aux griffes de la psychanalyse. Car avec elle, tous les problèmes humains sont déjà potentiellement tous définis, voire même conquis et solvables ; ce qui est délirant, puisque il n'y a strictement rien qui puisse échapper à la méthode d'interprétation vampirique de la psychanalyse, et à celle qu'elle fonde sur le symbolisme et l'inductivisme du sens.

Or, il n'est pas logiquement pensable que quelque chose, quoique ce soit que nous pourrions ignorer, ne puisse échapper à notre savoir. Nous voulons dire à tout ce qui a été humainement construit pour tenter de saisir le monde, que ce soit le monde qui nous est extérieur, ou celui qui nous serait "intérieur".



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Psychanalystes, dehors ! Et, pour vivre heureux, vivons cachés.

Les années 2020 seront celles de l'avènement d'une nouvelle forme de totalitarisme : le totalitarisme sophistiqué dont l'un des traits les plus marquants est cette lutte, cette haine tout à fait scandaleuse et révoltante contre la liberté d'expression, via un combat acharné contre ce qui est nommé le "conspirationnisme" ou le "complotisme".

Les années 2020 seront sans doute identifiées dans l'Histoire comme une "période charnière" entre la fin d'un "ancien monde" et la naissance d'un "nouveau" dont les prémices se révèlent de plus en plus menaçants pour les libertés individuelles.

Nous estimons qu'il est pertinent, plus que jamais, de citer Antonio Gramsci :

"Le vieux monde se meurt, le nouveau est lent à apparaître. Et c'est dans ce clair-obscur que surgissent les monstres".

Mais citons Karl Popper : "L'optimisme est toujours de rigueur".

Et nous-mêmes : "Restons citoyens, restons vigilants, mais, renonçons à la violence et à l'intolérance. Travaillons à sauvegarder la citoyenneté, à en améliorer le contenu et les pouvoirs, les libertés autant que les responsabilités".

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