jeudi 13 mai 2021

"HOAG. Un témoignage du futur". (Patrice Van den Reysen).


 

Il s'agit de science-fiction et je souhaiterais le faire connaître auprès d'un large public.

J'ai écrit ce roman comme une sorte de compte-rendu d'un cauchemar : le "dormeur" se réveille et il pense ensuite à coucher immédiatement sur le papier tout le contenu de son mauvais rêve..

Par conséquent, le récit contient presque tous les ingrédients constitutifs des cauchemars : les invraisemblances, les exagérations, les incongruités, le surréalisme, les horreurs et un ancrage sur le réel, passé ou présent, et une sorte de "happy end", comme une sortie de l'angoisse et de la terreur des pensées cauchemardesques : l'Humanité est enfin parvenue à vaincre la peur parce qu'elle a aussi vaincu le mythe du destin. Il n'y a plus aucune "bête de l'événement" (...) qui puisse la saisir d'effroi au point qu'elle choisisse ou subisse contre son gré de remettre sa sécurité et son avenir entre les mains d'un "Chef" totalitaire.
 
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Le roman met en scène des personnages imaginaires ou inspirés de personnages ayant réellement existé en me donnant l'occasion de les doter de motivations typiquement "hégéliennes" (inspirées des dernières sections de la philosophie du droit de Hegel) s'agissant de leurs objectifs totalitaires concernant le genre humain et sa destinée à travers des bouleversements et autres tragédies dans une société du futur.

L'histoire tente d'imaginer ce que pourraient être les versions futuristes les plus extrêmes et perverses du totalitarisme et des systèmes tyranniques qui en résulteraient. Il y a donc beaucoup de violence et même de l'ultraviolence dans le récit, non pour réaliser une apologie plus ou moins voilée ou implicite, (ou plus ou moins "esthétique") de la violence, mais pour la dénoncer, en susciter le dégoût, et je l'espère une réprobation unanime et totale, que ce soit sur ce qui peut en motiver l'usage et bien entendu sur ses manifestations.

Ce roman est donc destiné à un public averti et éclairé.
 
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L'un de mes objectifs était donc de participer, (à mon niveau), à une information ou même à une dénonciation des idéologies ayant toujours favorisé l'émergence du totalitarisme dans l'Histoire, (même si "l'histoire ne se répète jamais exactement selon un même prototype du passé"), me fiant en cela à l'oeuvre de Karl Popper et à ses arguments contenus dans les tomes 1 et 2 de "La société ouverte et ses ennemis", mais aussi dans "Misère de l'historicisme" et "L'univers irrésolu. Plaidoyer pour l'indéterminisme".

Mon roman est une charge des plus virulentes contre le totalitarisme, et, malgré toute la violence qu'il contient c'est mon "plaidoyer" contre la violence d'état, l'irresponsabilité morale, la cruauté, contre le mythe du destin et l'historicisme, donc une défense de l'indéterminisme et du libre-arbitre. C'est aussi, et selon moi, par voie de conséquence, un plaidoyer pour la démocratie, l'individualisme, l'état de droit et l'optimisme.

Un autre objectif fut donc aussi de défendre l'idée que même dans ses formes les plus extrêmes et brutales que l'on puisse imaginer, tout totalitarisme n'étant qu'une perversion sociale* contre la Nature Humaine, il ne peut qu'engendrer des projets politiques qui contiennent déjà dès le départ en eux-mêmes, les germes de leur propre élimination ; parce tout projet totalitaire ne peut que se heurter, tôt ou tard, à l'impossibilité logique d'abroger l'indéterminisme, (toujours inhérent au facteur humain dans l'univers de propensions dans lequel il se trouve, l'être humain étant lui aussi un "univers de propensions" toujours rétif à des explications puis des prédictions absolues de ses motivations et comportements par des idées ou des doctrines fondées sur la foi dans le déterminisme strict puis l'historicisme...), puisqu'il qu'il est impossible d'abroger également l'imprécision et le hasard. Mais à propos d'un lien entre déterminisme strict et totalitarisme, citons Karl Popper lui-même :

"Le déterminisme physique, pourrait-on dire rétrospectivement, était une rêverie d’omniscience qui semblait en voie de se réaliser davantage à chaque progrès en physique jusqu’à ce qu’il devint un cauchemar apparemment sans issue. Mais les rêveries parallèles des psychologues ne furent jamais autre chose que des châteaux en Espagne : c’étaient des rêves utopiques de faire jeu égal avec la physique, avec ses méthodes mathématiques et ses puissantes applications ; et, peut-être même, de la dépasser en façonnant les hommes et les sociétés. (Bien que ces rêves totalitaires ne soient pas sérieux du point de vue scientifique, ils sont très dangereux politiquement ; mais puisque j’ai traité de ces dangers ailleurs, je n’ai pas l’intention de discuter ce problème ici)." (In : Karl POPPER. « La connaissance objective ». Éditions Aubier, Paris, 1991, page : 340).

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L'on devinera des inspirations issues de grandes oeuvres comme celle bien connue de Georges Orwell et son "1984", mais aussi Aldous Huxley, pour ne citer qu'eux dans le domaine de la littérature. Mais des oeuvres du septième art m'ont également inspiré : "Metropolis" de Fritz Lang, "Orange mécanique" de Stanley Kubrick", ou "Mad Max" de George Miller.

Je considère le chef-d'oeuvre de Georges Orwell comme une oeuvre pessimiste, alors que mon roman, (malgré sa noirceur), est motivé par l'optimisme : je suis convaincu que l'être humain parviendra toujours à se sortir des pires situations imaginables grâce à ses différences de motivations et de compétences parce que leur émergence puis leur affirmation demeureront toujours incontrôlables en totalité, et que parce que s'il n'était poussé que par son instinct de conservation il ne pourrait que finir par rejeter la violence et continuer de rêver de sociétés où la violence aurait complètement disparue.

Karl Popper démontrait que le but de tout état de droit est l'éradication de la violence.Comment rejeter une telle idée ?

La logique suffirait à démontrer que nous n'avons d'autre choix que de toujours essayer d'aller plus loin dans l'élimination de la violence. Rabelais rêvait lui d'un "Fais ce que voudras". C'était une utopie sociale.

Mais au fond, que pouvons nous espérer de mieux ? 
 
Si nous sommes forcés d'accepter que le "Fais ce que voudras" restera une utopie, pourquoi ne prendrions nous pas cette idée comme la meilleure "idée directrice" et régulatrice imaginable pour nous guider pas à pas ou selon une "sociotechnique fragmentaire" (K. Popper) vers un univers social toujours meilleur, en corrigeant progressivement nos erreurs sous le contrôle de la méthode scientifique, plutôt que par des bouleversements opérant selon la méthode de la tabula rasa et des planifications totalitaires à grande échelle ? (K. Popper).

Je pense que l'un des meilleurs critères d'évaluation du progrès social repose sur l'accroissement des libertés individuelles et, de façon concomitante, toujours associée, de la responsabilité individuelle.

En somme, je pense que cet accroissement des libertés et des responsabilités nous rapprocherait toujours plus près de la possibilité d'un "Fais ce que voudras" sans que, bien entendu, nous ne puissions jamais l'atteindre dans sa perfection, donc en abandonnant le rêve romantique que nous pourrions un jour vraiment réaliser le Paradis sur Terre. 
 
Le rêve de Rabelais devrait donc demeurer, en tout conscience ou connaissance de cause une utopie dans les esprits éclairés par la raison, mais la meilleure idée directrice et régulatrice pour nous "guider vers la sécurité et la liberté" (K. Popper).

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Lors de la rédaction du roman, j'ai eu l'idée de réaliser des clips vidéos assez courts qui en relatent des passages, où je prends la place de certains de mes personnages ou du "témoin du futur". Ils se trouvent tous les deux sur ma chaîne Youtube et vous aideront, je l'espère, à mieux saisir par avance la teneur du récit :

Voici un clip qui est le monologue de "Alpha". C'est le monoloque mégalomanique d'un oligarque nourrit des idées de Hegel où le locuteur reclus dans un bunker après l'apocalypse nucléaire, dévoile à l'un de ses disciples ses projets et motivations intimes envers la société et plus largement l'être humain. Il est tiré du chapitre 1 du roman, "Apocalypse" :




Le rêve d'Alpha est un rêve impossible : c'est celui de rendre les hommes et les sociétés aussi contrôlables et prédictibles que "l'univers des horloges", alors qu'ils appartiendront toujours à "l'univers des nuages" (K. Popper).


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Il y a peut-être une chance pour que les hommes abandonnent définitivement la tentation au totalitarisme. C'est, comme le défend Karl Popper, de considérer que l'idéologie déterministe est morte (comme celle du positivisme logique) et doit être remplacée par la théorie des propensions : nous vivons dans un univers de propensions en étant nous-mêmes des propensions. Cette idée pose de nouveaux défis au réalisme scientifique donc à la Science, élément essentiel de l'évolution de toutes les sociétés, des idées et des décisions qui les guident.

Le défi fondamental posé par la théorie des propensions est celui de l'étude de la complexité des phénomènes, qu'ils soient relatifs à la Nature ou à la nature humaine et au monde des objets matériels. Il est par exemple trop réducteur de croire que ce soit uniquement (...) la gravité qui "fasse tomber la pomme de Newton", parce que si "la pomme tombe" ceci est lié à d'autres lois, d'autres paramètres qui sont parties prenantes d'une situation de problème propensioniste où agissent des lois déterministes, mais ces lois elles-mêmes, ne peuvent jamais être "strictes", absolues, définitives, si et seulement si, elles sont "scientifiques"..


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Puisque je suis enseignant, (et puisque l'éducation joue aussi son rôle dans la séduction par rapport à certaines idées philosophiques puis politiques), je crois aussi que toute situation d'enseignement doit être repensée avec l'approche de la théorie des propensions de Karl Popper. Le terme de "leçon" (d'E.P.S.) par exemple, que l'on nous a imposé reflète selon moi, un attachement à l'idéologie déterministe (stricte) en ce qu'il suggère qu'il serait possible d'envisager les contenus de formation comme autant de conditions initiales, de "passages obligés" sans lesquels aucun élève ne pourrait apprendre, c'est-à-dire des "conditions strictes" de tout apprentissage, même si les enseignants envisagent aussi des "variables", des adaptations de leurs stratégies didactiques ou pédagogiques.

Il n'y a, selon moi, aucune prétendue "condition stricte d'apprentissage" : aucune science ne pourra jamais garantir de manière absolue qu'un individu puisse apprendre (donc, toute tentative d'enseignement est et demeurera toujours faillible et l'on ne peut imputer sans arrêt à l'enseignant les causes des échecs des élèves ou de leurs mauvais comportements). 

Une approche propensioniste de la situation d'enseignement, voilà le nouveau défi qui engagerait de nouveaux efforts de recherche et une prise en compte multifactorielle, multidisciplinaire bien plus complexe ("écologique" ? Quoique cette préoccupation ne date pas d'hier, surtout en E.P.S.), qu'aujourd'hui des problèmes liés à la relation apprentissage-enseignement et de façon plus large à l'éducation.

De ce fait, l'élève, le citoyen doivent apprendre à se repenser comme des univers de propensions, tout en envisageant la société où ils vivent comme un univers de propensions, puis mener une réflexion en lien avec une compréhension de la responsabilité individuelle que cela suppose. Mais pour pouvoir se repenser comme tel, il faut un arbitre efficace dont on peut démontrer l'intemporelle validité, c'est l'épistémologie fondée sur la logiqueL'autre défi consisterait donc en ceci : l'introduction dans les programmes scolaires de l'enseignement à cette épistémologie, laquelle serait garante d'une lutte en profondeur contre l'émergence de la tentation au totalitarisme en enseignant comment invalider le déterminisme strict et ses deux "enfants" : l'historicisme et le mythe du destin.

En somme, si chaque individu, chaque citoyen, maîtrisait au moins les fondamentaux de l’épistémologie fondée sur la logique (et de l'usage rigoureux et non-violent du rationalisme critique) avec des notions de philosophie politique et un intérêt plus assidu pour l'information scientifique, l’émergence du totalitarisme n’aurait, je le crois, presque plus aucune chance.

Une nouvelle éducation à la non-violence, (indispensable à l'éradication de la tentation au totalitarisme puisqu'il est toujours lié à la violence ou à l'intolérance..), avec des contenus clairs et rigoureux, fondés sur une tradition de connaissances en philosophie mais aussi en sciences de la Nature, ne peut se passer de l’épistémologie et de la compréhension du rationalisme critique. Il s'agit de faire en sorte que la capacité à réfléchir de manière libre, indépendante et efficace ne soit jamais réservée au seul profit d'une minorité de "dominants" et dans les pires cas, "séquestrée" par eux.

Plus il y aura d'individus capables de réfléchir et de juger de manière éclairée et experte, plus la liberté et la responsabilité individuelle auront de chances face au risque toujours plausible qu'une minorité d'individus ait le projet d'y mettre fin aux seuls profits de quelques uns.
 
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Que "l'éducation pour tous" ne soit donc pas (ou ne soit plus...) une escroquerie, c'est-à-dire quelque chose qui ressemblerait aux voeux de Platon, où seuls quelques individus seraient destinés à constituer une élite intellectuelle vraiment apte à estimer par elle-même ses possibilités d'action par rapport à l'évolution de la société, que ce soit dans le but de concourir à sa pérennité ou, s'il le faut, à ses changements nécessaires. 

Soyons encore plus "socratiques" que nous n'avons essayé de l'être jusqu'à présent  et considérons qu'il est possible d'enseigner à chaque individu à guider sa pensée et à contrôler son jugement au plus haut niveau, à condition que les gouvernements aient sincèrement la volonté de former leurs pédagogues dans ce sens pour qu'ils en acquièrent les compétences, au lieu par exemple, de toujours tenter de formater la conscience des enseignants à la soumission sans condition ou presque à leurs chefs, quels que soient leurs fautes morales ou leurs égarements intellectuels envers eux.

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Dans l'éducation, il est temps de se débarrasser de l'idéologie et des constructions purement intellectuelles complexes lesquelles ne peuvent être fondées sur les faits des sciences de la nature. Et si la relativement récente préoccupation au sujet de l'intérêt des neurosciences dans l'éducation nous paraît un très bon signe, elle peut aussi être interprétée comme le fait que pendant des décennies, c'est surtout l'idéologie, un dogmatisme des décideurs et une intolérance à la critique donc de l'irrationalisme qui ont surtout fait loi.
 
 
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*"Perversion sociale" : nous qualifions le totalitarisme de "perversion sociale", parce que ce qui est qualifiable de "pervers" est par définition contre nature, et donc parce que nous en déduisons que toute privation de liberté, toute tentative de contrôler l'émergence puis l'épanouissement des différences individuelles joue invariablement contre la nature humaine. En nature, l'être humain est faillible et les pouvoirs de son corps et de sa raison sont limités. L'accès à l'absolu, à une forme de connaissance absolument précise ou certaine (donc susceptible de satisfaire aux exigences d'un déterminisme strict) dans le domaine de la Nature (les sciences de la nature) ou de la connaissance de la nature humaine (ce que l'on pourrait nommer les "sciences humaines") lui est d'emblée et pour toujours interdit pour des raisons indiscutables de logique, y compris dans la connaissance de tout objet matériel fabriqué par lui. (Pour le comprendre, nous conseillons la lecture de "La logique de la découverte scientifique" de Karl Popper, en particulier la section 37 de l'ouvrage, intitulée : "Domaines logiques. Notes sur la théorie des mesures"). Dès lors, l'Humanité n'a d'autre choix que d'accepter son faillibilisme, non comme une condamnation puis un pessimisme au sujet de l'individu justifiant ensuite une recherche pessimiste de la sécurité dans le totalitarisme par la limitation des libertés et le contrôle total des individus, mais comme une possibilité toujours offerte à l'optimisme. C'est-à-dire que c'est justement le faillibilisme humain et les différences individuelles qui offrent aussi la possibilité de l'heuristique puis les motivations originales et libres de découvrir des solutions inédites aux problèmes inédits, pour, comme l'écrivait Popper, "nous guider vers la sécurité et la liberté".
 


(Patrice Van den Reysen. Tous droits réservés).
 
 
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"HOAG. Un témoignage du futur" est donc un roman où dominent le cauchemar et l'ultraviolence. Mais il y a une fin heureuse :  
l'Humanité parvient enfin à dominer la peur.
 





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Psychanalystes, dehors ! Et, pour vivre heureux, vivons cachés.

Les années 2020 seront celles de l'avènement d'une nouvelle forme de totalitarisme : le totalitarisme sophistiqué dont l'un des traits les plus marquants est cette lutte, cette haine tout à fait scandaleuse et révoltante contre la liberté d'expression, via un combat acharné contre ce qui est nommé le "conspirationnisme" ou le "complotisme".

Les années 2020 seront sans doute identifiées dans l'Histoire comme une "période charnière" entre la fin d'un "ancien monde" et la naissance d'un "nouveau" dont les prémices se révèlent de plus en plus menaçants pour les libertés individuelles.

Nous estimons qu'il est pertinent, plus que jamais, de citer Antonio Gramsci :

"Le vieux monde se meurt, le nouveau est lent à apparaître. Et c'est dans ce clair-obscur que surgissent les monstres".

Mais citons Karl Popper : "L'optimisme est toujours de rigueur".

Et nous-mêmes : "Restons citoyens, restons vigilants, mais, renonçons à la violence et à l'intolérance. Travaillons à sauvegarder la citoyenneté, à en améliorer le contenu et les pouvoirs, les libertés autant que les responsabilités".

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